Texte de Jorane Bouchard, bénévole
À l’occasion de la Journée mondiale contre la traite d’êtres humains, il est crucial de se pencher sur une réalité alarmante : la traite des personnes, qui « implique de recruter, de transporter et de loger des personnes ou d’exercer un contrôle ou une influence sur leurs mouvements afin de les exploiter, généralement à des fins sexuelles ou de travail forcé (1) ». Souvent décrite comme une forme moderne d’esclavage, cette pratique se manifeste sous diverses formes, dont la mendicité, l’adoption illégale, les abus sexuels, la diffusion en ligne d’images abusives, et le recrutement dans des groupes armés.
Ce crime grave viole les droits fondamentaux des victimes, les privant de liberté et de dignité, et les soumettant à des traumatismes persistants dus à des abus émotionnels et physiques (2). Globalement, un tiers des victimes de trafic humain est enfant, un chiffre inquiétant qui révèle l’ampleur du problème (3).
À cet égard, la situation des enfants migrants non accompagnés aux frontières des États-Unis est particulièrement préoccupante puisqu’ils sont plus vulnérables à la traite de personne. Depuis 2021, environ 8 500 enfants migrants non accompagnés ont été recensés aux frontières des États-Unis (4). Ces enfants, souvent originaires d’Amérique centrale, prennent un risque énorme en fuyant la violence incontrôlée et le manque d’opportunités économiques exacerbé par la pandémie (5). En effet, il est estimé qu’environ 75% de ces enfants non accompagnés sont victimes d’une forme de trafic humain (6).
Lorsqu’ils sont arrêtés à la frontière, ces enfants sont placés en détention par le U.S. Customs and Border Protection (CBP). Bien que la loi TVPRA (Trafficking Victims Protection Reauthorization Act) stipule que les enfants doivent être détenus dans des conditions aussi humaines que possible, la réalité est souvent différente. Beaucoup sont placés dans des installations non autorisées et pris en charge par du personnel non qualifié, ce qui conduit à de nombreux abus, tels que des détentions prolongées, des conditions climatiques extrêmes et un manque de soins appropriés (7).
Ces conditions précaires et ce manque de protection exacerbent leur vulnérabilité et ouvrent la voie à d’autres formes d’abus. En effet, l’exploitation des enfants migrants aux États-Unis est particulièrement préoccupante. Ces jeunes, souvent dépourvus de protections adéquates, se retrouvent fréquemment dans des emplois dangereux, en violation des lois sur le travail des enfants. En arrivant en grand nombre sans leurs parents, ils se retrouvent souvent à exercer les emplois les plus pénibles du pays. La pression financière, due à la nécessité d’envoyer de l’argent à leurs familles ou de rembourser des dettes accumulées, les contraint à accepter ces postes précaires. Comme le témoigne Kevin Tomas, un jeune immigrant qui a commencé à travailler illégalement à l’âge de 13 ans après son arrivée aux États-Unis : « Ce n’est pas que nous voulons occuper ces emplois, c’est que nous devons aider nos familles. » (8).
Le ministère de la Santé et des Services sociaux des États-Unis est chargé de veiller à ce que les enfants migrants soient parrainés et protégés contre la traite et l’exploitation. Cependant, les vérifications rapides des parrains, en raison du grand nombre d’enfants, sont souvent insuffisantes (9). Une enquête a révélé que la plupart des travailleurs sociaux estiment qu’environ deux tiers des enfants migrants non accompagnés finissent par travailler à plein temps.
L’efficacité des protections légales prévues par la TVPRA est compromise par l’absence d’une source unique de responsabilité et de reddition de comptes, rendant ces enfants vulnérables aux mauvais traitements (10). Des cas choquants ont été rapportés, comme des enfants de 13 ans travaillant dans des usines de transformation de viande et des enfants de 12 ans chez des fournisseurs de grandes marques automobiles (11).
À l’occasion de la Journée mondiale contre la traite d’êtres humains, nous souhaitons mettre en lumière ces défis critiques. Il est essentiel de sensibiliser le public aux conditions précaires des enfants migrants et d’exiger des mesures concrètes pour renforcer leur protection. En unissant nos efforts, nous pouvons espérer offrir à ces jeunes un avenir où leur sécurité et leurs droits sont pleinement respectés.
Sources
(1)https://www.justice.gc.ca/fra/jp-cj/tp/quoi-what.html#:~:text=La%20traite%20de%20personnes%20implique,une%20forme%20moderne%20d’esclavage.
(2) Idem
(3) https://www.un.org/en/observances/end-human-trafficking-day
(4) https://crsreports.congress.gov/product/pdf/IN/IN11638
(5) https://www.nytimes.com/2023/02/25/us/unaccompanied-migrant-child-workers-exploitation.html
(6)https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5805654/#:~:text=Issue%20and%20Magnitude&text=Along%20the%20way%2C%20they%20face,labor%20or%20prostitution%20%5B3%5D.
(7) Idem
(8) https://www.nytimes.com/2023/02/25/us/unaccompanied-migrant-child-workers-exploitation.html
(9) Idem
(10)https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5805654/#:~:text=Issue%20and%20Magnitude&text=Along%20the%20way%2C%20they%20face,labor%20or%20prostitution%20%5B3%5D.
(11) https://www.nytimes.com/2023/02/25/us/unaccompanied-migrant-child-workers-exploitation.html